Coup d'État militaire au Burkina Faso

(Traduit)

Question :

Le 24 janvier 2022, l'armée du Burkina Faso a annoncé sa prise du pouvoir après avoir renversé le président Roch Kaboré, suspendu la constitution, dissous le gouvernement et le parlement et fermé les frontières. Le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaugo Damiba a signé la déclaration déclarant le coup d'État et un autre officier l'a lue à la télévision d'État sous le nom de "Mouvement national pour la protection et la réforme". Le communiqué promettait que le pays « reviendrait à l'ordre constitutionnel dans un délai raisonnable », mais ne précisait pas combien de temps. Qui est derrière ce coup d'état ? Est-ce lié au conflit international dans le pays?

Réponse :

Nous présentant ces points suivants pour clarifier la réponse :

1- Le Burkina Faso, dont l'ancien nom était Haute-Volta, est considéré comme un pays islamique, puisque plus de 60 % de sa population est musulmane. C'est le quatrième pays d'Afrique pour la production d'or et il contient de nombreux autres minéraux tels que le cuivre, le zinc et d'autres. Les Français ont occupé le Burkina Faso et lui ont imposé leur colonisation depuis 1896. Ils l'ont annexé à la Fédération dite française. Ils ont dû lui donner une indépendance formelle en 1960, alors la France a établi un régime et une armée qui lui est affiliée, elle a une base militaire appartenant aux forces spéciales qu'elle utilise pour maintenir son influence dans la région. La France l'a fait entrer dans le Groupe des cinq pays africains du Sahel (G5 Sahel) pour maintenir son influence en Afrique occidentale et centrale.

Elle y a lié son économie par le biais de ce qu'on appelle le franc africain qui se mesure à l'euro, l'argent des pays liés à cette monnaie était transféré à la Banque centrale française, ainsi la France investissait ces fonds comme elle le voulait pour soutenir son économie. Ce sont des méthodes coloniales pour maintenir le contrôle des colonisateurs sur le pays et pour piller ses richesses. Néanmoins, l'Amérique s'est efforcée d'y accéder en provoquant les idées de libération du colonialisme et les idées de la gauche, et en fournissant les soi-disant aides et prêts du Fonds monétaire international et ses conditions injustes, des organisations de la société civile, et en contactant les politiciens et les militaires. Récemment, elle a commencé à utiliser le prétexte de la lutte contre le terrorisme pour y étendre son influence, puisqu'elle a commencé à utiliser des bases militaires dans le pays contre des groupes islamiques armés.

2- L'Amérique a montré son intérêt pour ce pays et ses pays voisins, elle a donc nommé un envoyé spécial pour la région du Sahel depuis 2020, sous prétexte de faire face aux actes de violence et aux attaques des groupes islamistes armés. Le département d'État américain a annoncé que la situation dans les pays du Sahel, notamment dans la zone tri-frontalière entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, avait commencé à se détériorer et nécessitait la nomination d'un envoyé spécial pour la région. La France était à nouveau intervenue dans la région depuis 2013 après le coup d'État survenu au Mali en 2012 contre son influence sous prétexte de combattre les groupes armés islamistes dans le nord du Mali. Des manifestations ont eu lieu à la fin de l'année dernière contre la présence française dans le pays et son intervention en Afrique de l'Ouest, exigeant le retour de l'armée française dans son pays. Autrement dit, il existe un mouvement contre la présence française au Burkina Faso. Tout cela confirme l'existence d'un conflit franco-américain au Burkina Faso, comme c'est le cas en Afrique occidentale et centrale.

Ainsi, le conflit entre l'Amérique et la France en Afrique occidentale et centrale se poursuit. Lors d'une conférence de presse de Macron sur ce conflit, il l'a évoqué d'une autre manière, en disant : ["la relation [...] est devenue [...] un peu fatiguée" et "refaire un New Deal économique et financier avec l'Afrique" et a dit : "[L'Europe] doit établir un programme en termes de santé, d'éducation et de climat qui soit à la hauteur des défis de l'Afrique." (https://presidence-francaise.consilium. AFP 9/12/2021)]. Il a confirmé cette déclaration à nouveau lorsqu'il a prononcé un discours devant les députés du Parlement européen à Strasbourg le 19/1/2022, le jour où son pays a assumé la présidence de l'Union européenne pour six mois : ["dans lequel il a appelé à une nouvelle alliance avec le continent africain, et demandé un sommet entre les deux continents en février prochain." (France 24, 19/1/2022)]. Il a évoqué les investissements sur place, c'est-à-dire la domination des entreprises européennes, notamment françaises, sur les richesses du pays et leur pillage. Il a évoqué les investissements dans la santé, c'est-à-dire l'exploitation de la question des maladies pour écouler les médicaments, et il a évoqué la question de la sécurité pour y maintenir l'influence française.

3- Des sources sécuritaires avaient rapporté que le Président Kabore était détenu depuis le dimanche 23/1/2022 dans une caserne militaire après que des unités militaires se soient rebellées contre son autorité, exigeant le renvoi de hauts responsables de l'armée, du chef d'état-major et du chef des renseignements. Ils les ont accusés de ne pas avoir combattu les djihadistes et ont exigé que des ressources supplémentaires soient allouées pour affronter ces groupes. Ils ont exigé le départ du président et la libération de prison du général Gilbert Diender, condamné par les autorités en 2015 pour avoir mené une tentative de coup d'État ratée et emprisonné.

[L'armée a déclaré : "Kaboré n'a pas réussi à unir la nation et à traiter efficacement la crise sécuritaire qui menace les fondements de notre nation." (BBC 25/1/2022)]. Le chef du coup d'Etat, Paul Henry Sandaogo Damiba, officier supérieur d'infanterie dans l'armée burkinabé, est diplômé de l'Ecole militaire de Paris et a obtenu une maîtrise en sciences criminelles à l'Institut CNAM. Cette éducation et dans un pays dominé par la France et son armée en général et ses justifications peu convaincantes du coup d'état, avec l'émergence de preuves que la France n'a pas été dérangée par le coup d'état, mais plutôt l'émergence de preuves de son approbation de celui-ci.... Tout ceci confirme qu'il a réalisé ce coup d'état avec le soutien de la France.

4- Le président français Macron a déclaré après le coup d'État : "Le président du Burkina Faso Roch Marc Christian Kabore a été élu deux fois par son peuple lors d'une élection démocratique. On m'a dit qu'il n'est pas en danger d'atteinte physique..." (AFP 25/1/2022). Il y a de la ruse dans cette déclaration qui indique qu'il soutient le coup d'état, qu'il n'est pas désolé pour lui, et qu'il n'est pas inquiet de sa chute et du coup d'état contre lui. Mais il a dit : "Il n'est pas menacé de subir des dommages corporels !". C'est comme s'il voulait dire sur un ton populaire : "Heureusement qu'il a été sauvé sinon il aurait été tué !". La question de la France qui tue ses opposants au Burkina Faso et installe ses agents à leur place est bien connue. L'ancien président du Burkina Faso, Thomas Sankara, a été tué en 1987. Il s'était présenté comme un révolutionnaire marxiste pour couvrir son travail pour l'Amérique.

Il a été tué par l'agent français Blaise Compaoré, qui a pris le pouvoir après sa mort lors d'un coup d'État militaire concocté par la France cette année-là, et a continué à gouverner jusqu'en 2014, date du coup d'État des officiers de l'armée pro-américaine. Un an plus tard, ils ont permis la tenue d'élections, que Roc Kabore a remportées en 2015. Macron n'a pas exigé sa libération et son retour au pouvoir, tout comme les révolutionnaires au Mali ont exigé la libération du président malien Ibrahim Boubacar Keita, le respect de la constitution et le retour au pouvoir en 2020. Parce qu'au Mali, à cette époque, le président était un agent de la France, elle a donc exigé sa libération, mais ici, Macron n'a pas exigé la libération de Kabore. Cela indique qu'il n'est pas loyal envers la France. Macron n'a pas publié de condamnation au nom de la France, mais a déclaré : "Nous sommes "clairement, comme toujours" en accord avec la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest "pour condamner ce coup d'État militaire". C'est-à-dire que la condamnation est venue pour tromper et en accord avec les pays de ce groupe.

5- Quant à la position américaine, un porte-parole du Département d'Etat américain a déclaré :

"Les Etats-Unis appellent les forces armées du Burkina Faso à libérer immédiatement le président Kabore, à respecter la constitution du Burkina Faso et le pouvoir civil. Washington encourage le rétablissement de la sécurité et le dialogue pour répondre à leurs demandes..." (AFP 24/1/2022). Ceci indique que l'Amérique n'est pas satisfaite du coup d'état et exige la libération du Président Kabore et le respect de son statut de dirigeant civil du pays et le respect de la constitution en le ramenant au pouvoir en tant que président élu. Cette position est différente de celle qu'elle avait adoptée lors du coup d'État de 2014, lorsque Jen Psaki, alors porte-parole du département d'État américain, avait déclaré : ["Les États-Unis ne sont pas prêts à décrire si la prise de pouvoir militaire au Burkina Faso équivaut à un coup d'État ou non, une étape si elle est franchie peut nécessiter la cessation de l'aide américaine au pays." (Reuters 3/11/2014)].

Elle a soutenu le coup d'État de 2014 quand elle ne l'a pas qualifié de coup d'État, mais lors du dernier coup d'État, elle a demandé aux militaires de libérer immédiatement le président et de respecter la constitution, qui n'autorise pas les coups d'État et affirme la légitimité du président. La porte-parole de l'AFRICOM, Kelly Cahalan, a déclaré dans un courriel après le coup d'État du 25 janvier 2022 : "Le lieutenant-colonel Damiba [a reçu] des modules sur le droit des conflits armés, la soumission au contrôle civil et le respect des droits de l'homme. Les prises de pouvoir militaires sont incompatibles avec la formation et l'éducation militaires américaines." Alors que le commandement américain AFRICOM a indiqué que le lieutenant-colonel Damiba a participé à de nombreux cours et exercices militaires américains entre 2010 et 2020. Comme s'il n'était pas lié à l'Amérique et restait fidèle à la France, et que c'est pour cela que l'Amérique s'est opposée à la réalisation de ce coup d'état.

6- La Russie s'est intéressée à ce qui s'est passé au Burkina Faso. Le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré dans un communiqué : ["Moscou est préoccupé par la grave détérioration de la situation politique intérieure dans ce pays africain ami de la Russie, et suit de près l'évolution de la situation et compte sur son retour à la normale le plus rapidement possible." (site web du ministère russe des Affaires étrangères, 24/1/2022)]. Cet intérêt russe attire l'attention sur le fait qu'il existe une raison pour la Russie d'intervenir dans une sphère d'influence occidentale. Il est apparu que l'Amérique utilise la Russie en Afrique comme elle l'utilise au Moyen-Orient pour maintenir son influence, comme elle l'a fait en Syrie, où elle a donné le feu vert à son intervention en Syrie en 2015 pour protéger le régime de son agent Bachar Assad. Elle l'utilise aussi pour étendre son influence comme elle l'a fait en Libye, où elle a demandé à son client Haftar de se lier à la Russie et en tire un soutien contre l'Europe.

Elle a récemment chargé ses agents au Mali de lui demander un soutien pour faire face à l'influence française. La Russie a donc envoyé le groupe Wagner de mercenaires russes. Le chargé d'affaires du Conseil européen des relations étrangères, Andrew Leibowitz, a indiqué que : ["Les difficultés rencontrées par l'Europe et la France en particulier pour contenir les groupes djihadistes dans la région du Sahel ont fourni à la Russie l'occasion d'étendre sa coopération en matière de sécurité, notamment au Mali." (Khabar25.com 26/1/2022)]. Cependant, l'influence russe est loin d'être consolidée au Burkina Faso. Il n'y a pas de conflit entre la Russie et la France au Burkina Faso. Un haut responsable militaire français, qui n'a pas souhaité être nommé, a déclaré : ["Le fait que le lieutenant-colonel Damiba ait été formé à Paris et non à Moscou signifie que la France devrait être en mesure de trouver un moyen de poursuivre sa coopération, vieille de plusieurs décennies, avec l'armée du Burkina Faso, et de discuter des questions de sécurité nationale. (Mais) nous devons être actifs afin d'éviter tout vide que les Russes pourraient exploiter." (Khabar25.com 26/1/2022)].

7- Mais le conflit réel est entre l'Amérique et la France au Burkina Faso et en Afrique occidentale et centrale. Comme nous l'avons mentionné plus haut, des coups d'État et des contre-coups circulent entre l'Amérique et la France au Burkina Faso, et non seulement cela, mais le conflit est plus large que cela, car il fait rage dans toute l'Afrique entre l'Amérique et les anciens colonialistes, la Grande-Bretagne et la France, qui s'accrochent à leurs anciennes colonies et veulent rester, et maintenir cette colonisation sous diverses formes. Si les pays coloniaux n'occupent pas directement le pays, ils s'efforcent de trouver une influence par le biais d'agents dans divers domaines politiques, militaires, économiques, culturels, médiatiques et autres domaines vitaux et influents du pays. Cela fait partie des choses les plus dangereuses pour le pays. Ils sont plus dangereux que les armées de l'occupant, car l'occupant ne s'établira que grâce à eux, se cache derrière eux, réalise ses intérêts grâce à eux et se protège des combats en se protégeant derrière eux. ﴿هُمُ الْعَدُوُّ فَاحْذَرْهُمْ قَاتَلَهُمُ اللَّهُ أَنَّى يُؤْفَكُونَ﴾“Ceux-là sont les ennemis. Méfie-toi d'eux. Qu'Allah les anéantisse, comment ils se détournent?” [Al-Mounafiqoun: 4]

Il est apparu que la méthode des coups d'état est le moyen le plus facile d'étendre son influence et d'expulser l'influence des autres, ceci parce qu'il y a des âmes bon marché qui sont facilement achetées, leurs propriétaires sont prêts à coopérer avec tel ou tel colonisateur afin d'atteindre le pouvoir et d'occuper des positions même aux dépens de leur peuple et de leur pays. Ils ne connaissent pas de moyen de s'affranchir de ces forces, ils sont toujours à la recherche d'un soutien extérieur pour les aider à atteindre et à rester au pouvoir. Il n'y a pas parmi eux de mentalités indépendantes dans la pensée et la volonté, tout comme il n'y a pas de figures politiques idéologiques ou idéologiques qui savent comment diriger le pays et le faire revivre loin des forces extérieures. Le malheur des pays musulmans aujourd'hui, ce sont ces gouvernants fantoches qui placent la "présidence" au-dessus de leur pays et de leur peuple ! Il incombe aux musulmans d'œuvrer sincèrement et honnêtement pour éliminer l'influence coloniale de leur pays avec tous ses outils, et de reprendre le mode de vie islamique, alors cette Oumma reviendra comme Al-Aziz Al-Hakim l'a dit dans Son Noble Livre : ﴿كُنْتُمْ خَيْرَ أُمَّةٍ أُخْرِجَتْ لِلنَّاسِ تَأْمُرُونَ بِالْمَعْرُوفِ وَتَنْهَوْنَ عَنِ الْمُنْكَرِ وَتُؤْمِنُونَ بِاللَّهِ﴾“Vous êtes la meilleure communauté qu'on ait fait surgir pour les hommes vous recommandez le convenable, interdisez le blâmable et vous avez la foi en Allah. Si les gens du Livre croyaient, ce serait meilleur pour eux, il y en a qui ont la foi, mais la plupart d'entre eux sont des pervers.” [Al-i-Imran : 110].

27 Jumada al-Thani 1443 AH

30/1/2022